Bien que les années passaient, la rancoeur de notre curé envers
l'occupant ne se dissipait pas, bien au contraire.
Ses déboire avec l'administration l'avaient rendu encore plus agressif
et les sermons qu'il adressait à ses paroissiens pendant les offices
étaient de plus en plus violents.
Voulait-il décharger sa colère sur les fidèles de sa
paroisse?
Ayant eu écho
de ses colères, sa famille de Merten lui demanda d'être moins
sévère.
Sa réponse était toujours la même:
"Taisez-vous, vous n'y connaissez rien en religion"
Aux colporteurs qui apportaient les dernières nouvelles, la famille
demandait "Was macht dan der Morschbacher?" (Que fait notre curé de
Morschach?)
La réponse était "Er spalt Holz of der Kanzel" c'est-à-dire:
"Il fend du bois sur sa chaire". C'était une façon de dire
qu'il était toujours aussi agressif.
La présence
de la garnison allemande à Forbach perturbait également les
villages proches de Morsbach et les agissements des Prussiens dans la région
n'étaient pas ceux d'enfants de choeur.
C'est peu avant la
fin de la guerre de 14-18 que toute la rancoeur envers l'occupant que renfermait
le curé explosa, faisant grand bruit jusqu'au delà des frontières
de la Lorraine.
Un dimanche, avec la complicité de l'Archiprêtre Lemire de St
Avold, lui aussi révolté, il monta, au centre de l'église
Saint-Sauveur, un catafalque qu'il recouvrit du drapeau tricolore.
Puis l'archiprêtre, emporté par sa passion d'orateur, fit un
sermon en... français!
Celui-ci retraçait, en termes touchants et éloquents, les événements
auxquels il avait été mêlé en 1870 comme ancien
aumônier de l'armée de Metz sur le champ de bataille de Gravelotte
ainsi qu'à la bataille de Spicheren près de Forbach.
Cette manifestation patriotique ne laissa pas les Prussiens indifférents
et, dès le lendemain matin, les policiers vinrent arrêter nos
deux acolytes.
Vu son âge (79 ans) et sa cécité, l'Archiprêtre
Lemire fut rapidement relâché par les autorités alors
que notre curé passa une semaine à la prison de Sarrebruk.
Si l'affaire n'a pas pris des proportions plus dramatiques, c'est grâce
à l'intervention de Monseigneur Benzler, évêque de Metz,
et à ses relations avec l'Empereur Guillaume!