Homélie du 5è dimanche du Temps Pascal

Dans cet évangile du cinquième dimanche de Pâques le mot ‘demeurer’ revient 8 fois. Les deux disciples de Jean Baptiste, qui devinrent apôtre de Jésus, le suivirent et lui demandèrent : « Où demeures-tu ? »

Savoir où habite une personne, c’est mieux la connaître et avoir un point de repère. Si nous avons une demeure matérielle, nous habitons aussi nos relations, nos goûts, nos amitiés. En entrant en intimité avec quelqu’un, nous découvrons sa véritable demeure intérieure, et alors « demeurer » c’est « vivre avec »

Et c’est cela que Jésus veut nous faire comprendre ; Il voudrait tellement que nous vivions avec Lui ! Pour que nous comprenions bien, et comme Il en a l’habitude, Il nous donne un exemple tout simple tiré de la nature, de la vie des gens, le sarment greffé sur la vigne. C’est de cette façon que nous pouvons demeurer avec Lui.

Aujourd’hui encore beaucoup de gens sont en recherche d’une demeure fixe, où ils puissent vivre en sécurité ; pas uniquement les SDF, les sans-papiers et les « sans-riens » que l’on rejette, ou que l’on parque n’importe où. Mais aussi tous ceux qui sont « SDF dans leur tête », ceux qui n’ont plus de certitudes réelles, ni aucun repère, comme tous ces immigrés qui viennent se réfugier chez nous, qui sont affrontés à des difficultés, des inquiétudes au quotidien, à l’intégrisme, à l’intolérance et aux tracasseries de la vie sociale.

Avoir une demeure fixe, c’est pouvoir grandir dans la paix, dans la chaleur familiale, c’est pouvoir travailler et s’épanouir. Jésus nous invite à demeurer en lui, c.-à-d. à vivre de sa vie. Un sarment de vigne ne peut pas porter de fruits s’il n’est pas greffé sur le cep. Ainsi en est-il dans notre vie de chrétien : être coupé du Christ nous prive de sa vie, car Il nous donne la sève de son amour, de sa paix, de l’espérance et nous rend solidaires des autres.

Si nous le fréquentons régulièrement en lisant et en essayant de vivre l’Écriture, la Bible, en recevant les sacrements, surtout l’Eucharistie à laquelle nous participons régulièrement, en faisant découvrir l’action de son Esprit dans le monde, c’est signe que nous sommes greffés sur Lui. St Jean nous dit dans la deuxième lecture que c’est grâce à l’Amour, vécu concrètement, « en acte et en vérité » que nous demeurons en Dieu et que Dieu demeure en nous.

Pour porter du fruit nous devons nous laisser constamment transformer par Dieu : « Tout sarment qui porte du fruit, le Père le purifie en le taillant pour qu’il en porte davantage » Il y a en nous les branches mortes de l’égoïsme, de l’instinct de possession et de domination et des péchés de toutes sortes. Si nous voulons porter des fruits d’amour, d’accueil, de service et de don de soi, il faut nous débarrasser de tout cela et nous savons que ce n’est pas facile.

Demeurer dans le Christ, ce n’est pas fuir les réalités de notre monde, ce n’est pas nous réfugier dans une spiritualité désincarnée, « à l’eau de rose », qui peut nous donner bonne conscience ; c’est, à la suite du Christ, vivre à plein les réalités parfois douloureuses et crucifiantes de nos existences, c’est, porter, avec Lui, les joies et les souffrances de nos frères les hommes et nous engager avec courage et espérance dans la vie de tous les jours.

Frères et sœurs, soyons des sarments greffés sur le Seigneur ; demeurons en Lui pour porter des fruits d’Amour, de Foi et d’Espérance et ainsi vivons chaque jour la Joie de Pâques

AMEN.

Abbé Bernard SCHER