La mise en scène de soi même ne date pas d’aujourd’hui ; et sa critique non plus. Dans l’Évangile de Marc que nous venons d’entendre Jésus dénonce une fois de plus l’hypocrisie humaine et les faux-semblants ; là ce sont les scribes, les spécialistes de la loi qui sont visés. Ils paradent, ils se font passer pour des gens très vertueux et, en même temps ils s’emparent des biens des petites gens ; il y a un décalage entre ce qu’ils enseignent et ce qu’ils vivent ; extérieurement ce sont des gens très pieux, mais en réalité ce n’est pas le cas.
En face d’eux il y a cette femme, une veuve discrète, effacée. Avec les orphelins et les étrangers, les veuves comptaient parmi les catégories les plus vulnérables dans cette société dominée par les hommes.
Celle que Jésus remarque fait partie des anonymes, des rejetés de nos sociétés modernes, de ceux que l’on exploite et qu’on laisse sur le bord de la route. Il nous apprend à regarder les personnes que nous ne voyons plus, alors qu’elles sont tout proches de nous. Car notre regard est souvent sélectif, il se nourrit de nos peurs, de nos inquiétude, vis-à-vis de ceux qui sont différents de nous. Il n’est pas toujours facile de voir l’autre et de l’accepter tel qu’il est et non tel que je voudrais qu’il soit. Jésus nous apprend à ouvrir nos yeux sur ce que nous ne voyons plus : la beauté de la nature qui nourrit les oiseaux ; la force de la graine qui donne des fruits ; les personnes humiliées dont personne ne s’occupe, comme cette courtisane placée au milieu des regards accusateurs et haineux, le mendiant aveugle laissé au bord du chemin… et chacun d’entre nous peut continuer la liste. Nous ne savons plus voir ce qui est le plus important dans nos vies et nous discernons mal l’essentiel de l’accessoire
En attirant notre regard sur cette pauvre veuve, Jésus nous apprend à regarder le positif, à voir les vraies réalités du monde. Il nous explique que le don de deux piécettes de cette pauvre a plus de valeur que les ‘grosses sommes des riches’.
La pauvre veuve de Sarepta, dans la première lecture, chez laquelle le prophète Élie s’invite est, elle aussi mise en vedette ; elle a donné tout ce qu’elle avait.
De l’exemple de ces deux femmes pauvres je voudrais retenir deux leçons pour nous aujourd’hui :
Être attentif aux petites gens et aux petites réalités qui sont porteuses de sens et d’espérance. Parfois nous désespérons devant l’attitude de certaines personnes ou face à certains événements douloureux. Jésus nous invite toujours à un regard bienveillant d’espérance et de respect ; voir les petites avancées, toujours repérer le positif dans les autres.
Cela nous interroge aussi sur le regard que nous portons et sur la place que nous donnons aux plus petits et aux plus pauvres dans notre vie, dans la Société, dans l’Église. Dans « la joie de l’Évangile » le pape François nous rend attentifs à l’intégration des pauvres : « Chaque communauté et chaque chrétien sont appelés à être instruments de Dieu pour la libération et la promotion des pauvres et il est indispensable de prêter attention aux nouvelles formes de pauvreté et de fragilité… »
Que l’appel à l’entente entre les peuples, les communes, les personnes soit vécu concrètement et réalise dans notre vie quotidienne cette PAIX dont nous sommes l’image aujourd’hui, unis dans un même cœur pour cette célébration du 11 novembre.
AMEN
Abbé Bernard SCHER