D’après un compte rendu datant du 22 mars 2018, 800 millions de personnes restent sous-alimentées dans le monde ; de très nombreux enfants souffrent et meurent de faim et cela au 21ème siècle, dit « siècle moderne ». Certains, pour se dédouaner, pour se donner bonne conscience, demanderont : « Mais qu’est-ce que Dieu fait là dedans ? Pourquoi laisse-t-il s’étendre ce grand scandale ? » Il faudrait plutôt se demander : « Que font les pays riches ? Comment partagent-ils ? » Et finalement : « Comment moi, chrétien convaincu, je partage avec les plus pauvres ? »
Le prophète Elisée dans la première lecture et le jeune garçon de l’évangile n’ont pas refusé de partager ce qu’ils avaient. Ils auraient pu se mettre à l’écart de la foule et faire un bon casse-croûte avec quelques amis ; mais ils ont voulu partager ce qu’ils avaient. Jésus voulait faire ce miracle parce que le garçon a donné son pain et ses poissons avec générosité. Peut-être son geste a-t-il poussé d’autres, qui avaient aussi emporté à manger, à ouvrir leur cœur et leur sac pour partager.
Pourquoi, dans notre 21ème siècle, où les distances ne comptent plus, où les moyens techniques sont de plus en plus perfectionnés dans beaucoup de domaines, y a-t-il encore tellement d’êtres humains qui souffrent et qui meurent de faim ? C’est un des grands scandales de notre monde moderne. Les causes en sont multiples, mais c’est aussi parce que les pays les plus riches ne donnent que quelques miettes pour les plus pauvres ; ils refusent de partager par égoïsme, par cupidité, par indifférence. Et nous les particuliers : avec nos pauvres moyens, nous ne pouvons pas régler ces problèmes et nous risquons de baisser les bras comme les apôtres : « Nous n’avons pas assez d’argent pour acheter du pain pour toute cette foule… Que pouvons-nous faire avec 5 pains et 2 poissons ? » L’impuissance et le découragement nous guettent et finalement nous ne faisons rien et nous avons bonne conscience !
‘Ouvrir son cœur’ est la première des conversions et la plus importante ; cela changerait la face du monde, en commençant par notre vie quotidienne ; la majorité des souffrances humaines vient sans doute de la dureté du cœur, du ‘chacun-pour-soi’ à l’échelle mondiale, comme dans nos relations personnelles. Si nous partagions à tous les niveaux, il y aurait certainement du pain pour tout le monde. Pour beaucoup de nos contemporains le partage, l’ouverture aux autres sont plus convaincants que tous nos plus beaux discours et toutes nos plus belles célébrations.
Comment partageons-nous ce que nous avons, biens matériels ou autres ? Le Seigneur ne nous demande pas de faire des miracles, il s’en charge lui-même ; nous savons que nous ne pouvons rien faire sans lui, mais lui ne veut rien faire sans nous.
Cet Évangile nous renvoie à l’Eucharistie où nous recevons le Corps du Christ ; il nous invite au partage, non seulement du pain matériel, mais aussi à l’accueil, à l’amitié, au respect pour tous. Comme André, qui a remarqué le garçon, soyons nous aussi, attentifs à tous ces petits gestes de partages qui se vivent autour de nous, car il y a encore des gens (riches ou plus pauvres) qui partagent et qui ont un cœur ouvert. Soyons de ceux-là.
AMEN.
Abbé Bernard SCHER